Vege or non-vege ?
Tout commence par une scène vécue au McDonald de Jalandhar. Je sais rien que cette phrase annonce tout un programme. Mais les Américains n’ont peur de rien. J’ai été invité ici par un ami qui doit être suffisamment familier avec la culture occidentale pour imaginer qu’un morceau de poulet frit va me faire plaisir. Il ne sait pas à quel point j’ai pu saliver en pensant à cette bouchée de poulet. Il y a bien des endroits qui vendent de la viande à Jalandhar mais lorsque je vois les morceaux de porc qui pendent à un croc sur le trottoir avec des centaines de mouches tout autour, je ne sais pas pourquoi, je me dis que je suis tout aussi heureux en étant végétarien. Moi végétarien, la vie est pleine de surprise.
Et donc nous sommes au Mc Do. Et je regarde ce qu’on peut commander : le choix est ridiculement maigre. Trois sandwiches sont affichés : le McVeggie, le McChicken et le McFish. Je demande poliment si je peux manger “non-vegetarian” c’est à dire carnivore (ahah) et il me dit que oui, que je suis l’invité et que je peux commander tout ce qui me fait plaisir. Alors je dis que je veux des frites du Coca et… une sauce barbecue ! Tout MacDonald qui se respecte doit bien avoir une sauce barbecue. Et en effet, ils en ont. 15 roupies rien que pour la sauce ! C’est le prix de trois voyages en rickshaw entre chez moi et l’université ! Nous nous installons et je propose à mon hôte un peu de sauce… Il me regarde étrangement et me demande si c’est végétarien. Je ris et dis : “oui, bien sûr”. Puis je suis pris d’un doute. Je regarde le petit pot. Ouf, oui, il y a bien le petit pictogramme vert qui signifie que le produit est végétarien.
Au Pendjab la société est coupée en deux : il y a les vege (prononcer vèdje) qui ne mangent pas de viande ni d’oeuf et il y a les non-vege (prononcer none vèdje) et qui osent. L’autre jour, une de mes collègues m’a dit qu’elle avait rapporté un plat non-vege. En fait, il s’agissait de minuscules morceaux de mouton et c’était tellement couvert d’épices que je n’en ai pas mangé plus qu’une bouchée.
Le vrai tabou c’est la viande de boeuf. Les exercices de mon manuel comportent énormément de référence à l’alcool (un verre de vin, quoi), à la cigarette (oui oui) et à la viande de boeuf. “Maman prépare un rôti”. Dans ces cas là je saute la page de peur que mes étudiantes ne se mettent à hurler au massacre. Sauf qu’il y a bien des gens qui mangent du boeuf en Inde, car après tout le pays compte plusieurs millions de Chrétiens, de Juifs et de Musulmans. Toutes ces communautés peuvent manger du boeuf sauf qu’ils le font en cachette.
Je n’arrive pas à me faire à l’idée que certains de mes amis n’ont jamais goûté à de la viande.
Hier j’ai trouvé le logo 100% Végétarien sur mon tube de dentifrice.
Ce matin, j’ai trouvé une notice dans un couloir de là où j’habite qui explique que tout produit “toxique” ou non-vege est interdit à l’intérieur du bâtiment. La notice fait mention aussi de l’interdiction d’apporter des oeufs.
Je n’arrive pas à comprendre d’où vient cet interdit : il semble que ce soit un mélange entre interdits religieux et habitudes culturelles. Lorsque je demande si c’est directement lié à la religion hindou on me répond que non et pourtant les Sikhs sont pour la plupart non-vege.
Pour terminer, je voulais vous montrer à quoi ressemble une belle assiette. Avec dans le sens des aiguilles d’une montre : le dahi, sorte de fromage blanc, le cheese, sauce dans laquelle flottent quelques morceaux de fromage, le paneer, et sa version alliée aux épinards (palek paneer) puis le subji (les légumes), le fameux dahl (sauce aux lentilles) et enfin le petit pot de green ketchup, qui n’a rien à voir avec la sauce tomate mais qui est une sauce un peu épicée (de type chutney). On mange le tout avec ces galettes (tchipati) en buvant du lassi, boisson à base de yaourt.
Bon app’
January 31st, 2010